Portrait Entrepreneur : Yaye souadou Fall co-fondatrice de E-Cover, la première entreprise de recyclage de pneus au Sénégal et en Afrique de l’Ouest

La vingtaine seulement, elle est déjà un exemple pour plusieurs générations. Ayant eu l’ingénieuse idée de transformer de vieux pneus en matériaux de construction, son engagement en faveur de l’économie verte a été reconnu et salué par l’Union européenne lors de la Cop22. Yaye souadou Fall, est la Directrice et co-fondatrice d’E-Cover, l’entreprise de recyclage de vieux pneus. Portait.

Avant cette aventure, Yaye Souadou était étudiante à l’Institut Supérieure de Management (ISM) de Dakar où elle poursuivait une licence en administration des entreprises. Cette aventure est née d’un devoir d’école qu’elle a décidé avec sa collaboratrice, Khady et quelques amis de concrétiser.

« Au début, c’était un devoir d’école, on nous avait demandées –écoutez, vous êtes des gestionnaires, créez une entreprise, mettez en pratique ce que vous apprenez à l’école. Et donc on voulait à l’époque faire quelque chose qui soit dans l’environnement et nous nous sommes dit, pourquoi ne pas recycler les pneus ? Nous avons commencé à faire des recherches sur le recyclage des pneus et c’est là que nous avons découvert qu’il était possible d’en faire des carreaux ou des revêtements de sol », raconte Yaye.

« Dans les vidéos qu’on voit c’est de grosses machines, on n’est que des étudiantes, on a rien de tout ça, on a que notre argent de poche et comment on va faire pour faire ça ? Après, on a découvert qu’il était possible de les hacher avec les hachoirs à viande. Et on s’est dit, on commence par-là », continue-t-elle.

Le groupe décide alors d’utiliser cet outil pour le moins insolite : un hachoir à viande et pour la première expérience, ça n’a pas du tout été facile. Ce fut des moments de dur labeur, de recherches et le 8 avril 2015, elles réussissent à broyer leur premier pneu et c’est cette date-là qu’elles considèrent comme la date de la naissance d’E-Cover.

La question du financement, la plus grande interrogation

Comment prouver à des investisseurs que son projet est viable, malgré sa jeunesse et son manque d’expérience ? Souadou et son équipe se sont essayés au crowdfunding, mais ont dû essuyer le premier échec de leur jeune carrière. Il en fallait pourtant plus pour les décourager. Cette expérience leur a tout de même permis de fédérer une communauté qui leur a ouvert de nouvelles portes.

Yaye Souadou Fall participe alors à de nombreux concours, locaux et internationaux. En 2016, elle remporte 15 000 dollars à l’Anzisha Prize et le projet prend alors une autre dimension. « Lorsque j’ai relevé les 15 000 dollars, je me disais que c’était la fin des problèmes. Ca ne l’était pas. 15 000 dollars dans une industrie ça passe très vite… », Rapporte Yaye

De nouvelles opportunités, le soutien des organismes, une aubaine pour E-Cover

« En étant des jeunes dames sénégalaise en Afrique de l’Ouest, avec un projet industriel, ce n’était pas du tout évident en tant qu’étudiantes de partir de zéro, du hachoir à viande pour en arriver là. Il a fallu vraiment avoir du courage, beaucoup de force et avoir des gens qui étaient disons fou d’investir et de croire en nous », déclare la jeune dame.

C’est donc avec l’aide et le soutien de plusieurs organismes qu’E-Cover a surmonté les péripéties et est devenue l’une des start-ups qui cartonne dans le recyclage en Afrique. E-cover, aujourd’hui, est une entreprise de plus de 20 employés avec une équipe de chargement, une équipe de production et une équipe administrative qui œuvre à recycler les pneus usagés. Elle a déjà recyclé plus de 800 tonnes de pneus.

Découpés broyés puis transformés en granulats, ces pneus recyclés sont utilisés pour la production de revêtement des sols, aires de jeux pour enfant, terrain de basket et plus récemment, gazon synthétique pour les terrains de football. C’est même la première entreprise du pays à fabriquer un granulat répondant aux normes de la FIFA.

Une aubaine pour Khadim Mbaye, Directeur du stade municipal de Malika, en banlieue de Dakar. Auparavant, il était obligé d’importer le granulat de Turquie. Son prochain grand marché, Yaye Souadou l’a décroché au Mali. Elle espère que son innovation facilitera la construction d’infrastructures sportives à même de promouvoir le football sur le continent.

Un local pour E-Cover

Aujourd’hui, l’entreprise E-Cover a un local situé à Bambilor. Le choix de Bambior, Yaye l’explique par le fait que là-bas, ils ont vu qu’il y avait une communauté qui avait vraiment besoin d’eux, parce qu’il y avait beaucoup de pneus aux environs et qu’il y avait pleins de gens qui n’avaient pas d’emplois.

 Chez E-Cover, alors que Khady gère le côté production et technique, Yaye Fall s’occupe du côté administratif, commercial et financier. Elle conseille aux jeunes qui veulent entreprendre, d’arrêter de penser que le manque de financements immédiats est un obstacle pour ne pas réaliser son projet. Il faut y croire.

Danielle N.