Le Cameroun lance un programme de 3 milliards FCFA pour maintenir l’accès de son cacao au marché de l’UE

Face aux nouvelles normes européennes sur la traçabilité et la lutte contre la déforestation, le Cameroun lance le projet SAFE pour soutenir ses producteurs et sécuriser ses exportations de cacao vers l’Union européenne.
Le Cameroun se mobilise pour défendre sa place sur le marché européen du cacao, qui représente près de 70 % de ses recettes d’exportation dans ce secteur stratégique. Le 25 juin dernier à Yaoundé, le ministre de l’Économie, Alamine Ousmane Mey, a procédé au lancement officiel du projet Sustainable Agriculture For Forest Ecosystems (SAFE), une initiative d’envergure visant à adapter la filière cacao aux nouvelles exigences environnementales de l’Union européenne.
D’un montant de 4 millions d’euros (environ 2,6 milliards FCFA), le projet est financé par le ministère néerlandais des Affaires étrangères et mis en œuvre par l’agence allemande de coopération internationale (GIZ). Il s’inscrit dans une dynamique mondiale de transformation des chaînes de valeur agricoles, à l’heure où l’Europe s’apprête à appliquer, à partir du 31 décembre 2025, le Règlement sur la déforestation et la dégradation des forêts (RDUE).
Le RDUE impose désormais aux exportateurs de cacao de prouver que leurs produits ne sont pas issus de la déforestation, tout en garantissant la traçabilité, le respect des droits fonciers, la protection des populations autochtones, et des normes sociales élevées. Pour le Cameroun, il s’agit d’un véritable défi, mais aussi d’une opportunité de moderniser sa filière cacao. « Il s’agit d’une initiative mondiale ambitieuse visant à accompagner la transition vers des chaînes de valeur agricoles durables, légales et sans déforestation », a affirmé le ministre Alamine Ousmane Mey lors de la cérémonie.
Un projet à fort impact pour les petits producteurs
SAFE s’adresse en priorité aux petits exploitants, souvent confrontés à un manque d’accès au financement, à la technologie, et à l’information. Le projet prévoit : de faciliter l’accès au crédit agricole, de renforcer les compétences techniques des producteurs, et de diffuser les bonnes pratiques agricoles via des plateformes d’échange à l’échelle nationale et internationale. Le programme entend ainsi promouvoir des méthodes agricoles durables, améliorer la résilience des producteurs, et renforcer la compétitivité des produits camerounais à l’export.
Le projet SAFE est déployé dans 10 pays pilotes : Cameroun, Brésil, RDC, Équateur, Indonésie, Pérou, Zambie, Ouganda, Vietnam et Burundi. Son financement global s’élève à 65,5 millions d’euros, répartis entre l’Allemagne (25 M€), les Pays-Bas (20 M€) et l’Union européenne (20,5 M€). Au Cameroun, il couvrira la période d’octobre 2024 à décembre 2027. Par ailleurs, SAFE sera coordonné avec le Programme cacao durable (SCP) de l’UE, afin d’optimiser les synergies et d’éviter la duplication des efforts.
Notons qu’en 2024, les recettes d’exportation de cacao du Cameroun ont atteint 1 000 milliards FCFA, dont près de 700 milliards FCFA provenaient des pays de l’Union européenne, selon Aliou Abdoullahi, coordonnateur national de la coopération Cameroun-UE. En volume, cela représente 74 % des exportations, soit 185 613 tonnes métriques sur la saison agricole 2023/2024, d’après les données de l’Office national du cacao et du café (ONCC).
Autrement dit, l’avenir du cacao camerounais passe inévitablement par l’Europe. Le succès du projet SAFE sera donc déterminant, non seulement pour maintenir l’accès au marché européen, mais aussi pour poser les bases d’une transformation en profondeur des filières agricoles nationales.
Danielle N.